Au XXIe siècle, la majorité de ceux qui s’intéressent à la spiritualité et à la religion sont des « croyants ». Ils croient en quelque chose qu’ils n’ont pas vérifié eux-mêmes. C’est un « acte de foi » qui repose sur la confiance en une autorité spirituelle individuelle ou une tradition et à leurs dogmes et principes. Ces croyants adhèrent à des « constructions mentales » (comme la description d’un paradis après la vie terrestre, d’un état de grâce dans cette vie-ci, d’une réalité transcendantale invisible mais qu’il faudrait vénérer, etc.) qui motivent leur engagement et leurs actions. Le fait que des autorités différentes décrivent des paradis, des états de grâce et des réalités transcendantales très différentes n’a pas encore ému ces croyants au point de leur faire douter de la validité de ces constructions mentales. Ils croient que leur construction d’une promesse spirituelle est la bonne et que l’autorité qui l’a si minutieusement exposée est, évidemment, la mieux inspirée.
Ce phénomène, aussi ancien que l’humanité, n’a pas été ébranlé par les attaques virulentes des rationalistes, des athées et de tous ceux qui se sont révoltés contre les spiritualités dogmatiques, coupées du réel.
Il semble y avoir une raison profonde à cet attachement aux « croyances » qui constitue l’essentiel de la religiosité aujourd’hui.
Les objectifs tiennent une place prépondérante dans la démarche religieuse : il faut agir d’une certaine manière pour mériter quelque chose dans l’avenir. Cette mobilisation de l’attention des croyants sur le comportement et le futur fait comme un socle immuable sur lequel reposent les institutions. Les croyants les plus motivés s’appliquent à se comporter de manière conforme et à espérer qu’ils mériteront le cadeau qui leur a été promis.
Contrairement à certaines apparences, cette attitude n’est pas limitée aux anciennes religions les mieux établies et les plus reconnues. Même si les nouvelles expressions de la spiritualité semblent moins rigides en apparence ou ont développé des concepts et des postures plus originales, il reste que le comportement du croyant repose toujours sur ce socle commun : « J’agis d’une certaine façon pour obtenir quelque chose que je ne vois pas mais qu’on m’a promis et en quoi je veux croire ». Un catholique ajustera son comportement aux préceptes de sa religion afin de pouvoir gagner le paradis des chrétiens. L’action du catholique pour mériter ce futur glorieux est reconnaissable, elle est inspirée par des valeurs bien connues dans notre civilisation. Depuis la moitié du XXe siècle, les spiritualités d’inspiration orientale ont été l’objet d’un certain engouement pour les jeunes générations. On pourrait penser qu’elles ont révolutionné le socle commun des religions, débarrassé les croyants de leur engagement aveugle, inspiré à une exploration plus consciente de la vie intérieure plutôt qu’à l’adhésion irréfléchie à des principes intellectuels. On peut constater qu’il n’en est rien (...)
Le fait est qu’il n’existe pas aujourd’hui de démarche spirituelle qui ne soit fondée sur une « croyance intellectuelle » et un « futur hypothétique ». La cause de ce système qui sclérose toutes nos spiritualités est assez simple : l’espace même de l’expérience de toute spiritualité nous effraie et toute l’attention des croyants se porte ailleurs pour l’éviter.
Extrait du livre que vous trouverez sur le lien ci-dessous
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