Jusqu’à la première moitié du XXe siècle, la plupart des peuples et des gouvernements étaient nationalistes, en ce sens qu’ils privilégiaient les intérêts politiques, économiques, géostratégiques, etc., de leur pays ou de leur nation, souvent d’une manière excessive. Avec la mondialisation des échanges et la généralisation d’Internet, nombre d’entre eux se sont ouverts sur les autres et ont noué des relations internationales. Ce faisant, le nationalisme a cédé progressivement la place à l’internationalisme, au sens positif du terme. Comme nombre de Rose-Croix, je pense que c’est une bonne chose, car une telle ouverture sur le monde rapproche les êtres humains et constitue par conséquent un vecteur de fraternité et de paix.
Depuis l’émergence de la crise à la fois financière, économique et sociale qui frappe la plupart des pays du monde, on constate un repli nationaliste dans nombre d’entre eux. Cela s’explique par le fait que lorsque les êtres humains que nous sommes se sentent menacés dans leur intégrité et leur dignité, ils ont tendance à privilégier les intérêts de la nation à laquelle ils appartiennent, à l’exclusion des autres. Dans les cas extrêmes, ceux qu’ils considèrent comme des “étrangers” deviennent à leurs yeux les responsables des problèmes et des difficultés auxquels ils sont confrontés au quotidien. Le nationalisme se teinte alors de xénophobie, avec tout ce que cela implique en termes de discrimination et d’oppression.
De mon point de vue, le repli nationaliste et le nationalisme en général ne peuvent qu’aggraver la précarité socio-économique des pays concernés. L’un comme l’autre sont à contre-courant de l’histoire, en ce sens que la mondialisation est un processus irréversible. Certes, il y a beaucoup à faire pour que ce processus soit bénéfique à toutes les nations et à tous leurs citoyens, mais c’est en lui que réside désormais la solution globale à la crise mondiale. Plutôt que de s’y opposer ou de s’en extraire, il faut plutôt l’accompagner, voire l’accélérer, et tout mettre en œuvre pour qu’il soit porteur de prospérité pour tous les pays, quels qu’ils soient. Plus que jamais, les destins de tous les peuples sont liés, de sorte que l’isolationisme ne peut rien leur apporter de bon.
Face à la crise actuelle, il est normal qu’un pays sauvegarde les intérêts socio-économiques de ses citoyens. C’est d’ailleurs ce que la plupart d’entre eux attendent de ceux qui les gouvernent, quelles que soient les idées politiques des uns et des autres. Mais ce doit être alors pour répondre à une nécessité du moment et dans l’esprit de l’adage « Charité bien ordonnée commence par soi-même », et non pour des raisons idéologiques fondées sur le refus de s’intégrer dans le processus de la mondialisation, lequel, comme je l’ai dit précédemment, est non seulement inévitable, mais également prometteur si l’humanité le gère avec sagesse, c’est-à-dire dans l’intérêt de toutes les nations.
Depuis son apparition sur Terre, l’humanité a évolué dans la division, d’où les conflits et les guerres qui ont jalonné son histoire. Il est temps que tous les êtres humains comprennent qu’ils ne font qu’un et que c’est dans l’union, pour ne pas dire l’unité, que résident le bien-être et le bonheur auxquels ils aspirent. Tant qu’ils n’accepteront pas cette évidence, ils continueront à s’opposer et à s’exclure entre nations et entre individus d’une même nation. Pourtant, il est évident que la crise étant mondiale, la solution à lui apporter doit l’être également.
Serge Toussaint
Grand Maître de l’Ordre de la Rose-Croix