En cette période de crise, on parle beaucoup de la nécessité de relancer la croissance et, par là même, de relancer l’économie. Comment ? En incitant les gens à consommer davantage, de façon à devoir produire davantage et à induire du travail, condition nécessaire pour maintenir les emplois existants et en créer de nouveaux. En vertu de ce principe, pour ne pas dire de ce dogme, la plupart des politiciens, tous partis confondus, font de la relance de l’économie une priorité. Bien que n’étant pas spécialiste en économie, je ne suis pas convaincu que sa relance dépende de la croissance, au sens de consommer davantage et de doper la production ou, ce qui revient au même, de produire davantage et de booster la consommation.
Est-il normal qu’une société permette aux citoyens de consommer ce qui est nécessaire à leur bien-être matériel ? Bien sûr que oui. C’est même un devoir qu’elle a envers eux. Est-il pour autant judicieux de les inciter à consommer au-delà de leurs besoins réels ? Je pense que non. Or, tout est fait de nos jours pour les inciter à consommer « coûte que coûte » et à se procurer nombre de choses aussi inutiles qu’artificielles. Rien n’est négligé dans ce but : crédits attractifs, promotions en tous genres, publicités quasi-mensongères, etc. Ce faisant, on conditionne les gens à rechercher le bonheur dans l’avoir et, pour nombre d’entre eux, à s’endetter au-delà du raisonnable. Par ailleurs, on en fait des consommateurs perpétuellement insatisfaits, car il n’y a pas de limite au désir de posséder.
En caricaturant quelque peu, on peut dire que dans la plupart des pays, les consommateurs se divisent en deux grandes catégories : ceux qui ont les moyens de consommer et ceux qui, malheureusement, ne les ont pas. Plutôt que d’inciter les premiers à consommer toujours plus et à faire de l’avoir l’idéal de leur vie, on devrait leur apprendre à consommer raisonnablement et à donner dans ce domaine l’exemple de la modération. Pour ce qui concerne les seconds, il faudrait naturellement faire en sorte qu’ils puissent se procurer ce qui leur est nécessaire pour vivre confortablement sur le plan matériel. C’est là, me semble-t-il, le véritable enjeu de l’économie.
Je pense également que l’on devrait revoir totalement le concept de production. De nos jours, on produit pour produire, afin de maintenir les emplois. Dans nombre de domaines, il y a même surproduction, en ce sens que l’on sait parfaitement que tous les articles produits (à la chaîne) ne seront jamais achetés et constituent des stocks qui ne cessent de croître. C’est le cas, par exemple, dans l’électroménager, l’ameublement, l’habillement, etc., sans parler de l’alimentation, où l’on s’autorise un gaspillage véritablement indécent (chaque année, des millions de tonnes de viande périmées sont incinérées). Si cette politique de surproduction devait se généraliser à l’échelle du monde, il faudrait l’équivalent de plusieurs planètes comparables à la Terre pour obtenir ne serait-ce que les matières premières nécessaires. Assurément, on ne peut continuer dans cette voie.
De mon point de vue, il devient urgent de moins produire, mais de mieux produire, c’est-à-dire de remettre l’homme au centre de la production et de faire en sorte que celle-ci respecte la nature. Cela suppose de mettre fin au machinisme excessif qui sévit dans les pays dits développés et qui s’instaure dans les pays en voie de développement. Alors que les machines auraient dû se limiter à aider l’homme dans les travaux les plus pénibles, elles en sont venues à le remplacer à des fins de rentabilité et de profit. La sagesse voudrait que l’on ″démachinise″ la production et qu’on la ré humanise, ce qui entraînerait la création de nombreux emplois, sans parler de tous ceux qui pourraient être créés en relation avec l’écologie. Beaucoup diront qu’il est devenu impossible de revenir en arrière. Je n’en suis pas certain ; et aurons-nous encore longtemps le choix ?
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