L’une des plus belles vertus que l’homme peut exprimer à l’égard de ses semblables est la compassion. Comme vous le savez, cette vertu consiste à compatir aux épreuves et aux souffrances d’autrui, c’est-à-dire à s’y associer et à les partager, ne serait-ce qu’intérieurement. Dans la mesure du possible, l’idéal est de manifester cet élan intérieur à travers des actes d’entraide, de solidarité et de fraternité, ce que les Rosicruciens s’efforcent de faire. À l’opposé de cette vertu, nous trouvons cette faiblesse, pour ne pas dire ce défaut, qu’est l’indifférence, avec son corollaire : l’égoïsme.
Trop souvent, on donne à la compassion une connotation religieuse. S’il en est ainsi, c’est parce qu’elle occupe une place très importante dans la plupart des religions. Bouddha et Jésus, en particulier, en ont fait le fondement de leur philosophie. Si je dis « philosophie », c’est parce que cette vertu ne constituait pas pour eux un point de doctrine, mais un idéal de comportement envers ceux qui souffrent ou sont dans le besoin. Vu sous cet angle, il n’est nul besoin d’avoir la foi pour compatir à la souffrance d’autrui et agir pour essayer de la soulager ou de la faire disparaître. Il suffit, si j’ose dire, d’être humaniste.
Comme nombre de vertus, la compassion n’est donc pas un sentiment religieux ; elle s’inscrit dans une démarche philosophique et humaniste. Il est évident que si cette vertu était plus répandue parmi les hommes, le monde serait infiniment meilleur. Il faudrait pour cela que chacun se sente concerné par le bien-être et le bonheur des autres, sans distinction de race, d’ethnie, de nationalité, de culture, etc. Malheureusement, la crise généralisée à laquelle le monde est confronté depuis plusieurs années tend à rendre les gens encore plus individualistes et nationalistes, deux comportements qui sont facteurs de discrimination et d’exclusion.
Peut-être dans un souci d’être ou de paraître laïques, certaines personnes préfèrent parler d’empathie plutôt que de compassion. Pourquoi pas, puisque le mot « empathie » a pour définition « faculté de s’identifier à quelqu’un, de ressentir ce qu’il ressent ». Cela étant, il me semble que le mot « compassion », qui se définit comme le «sentiment qui porte à plaindre et partager les maux d’autrui», est à la fois plus précis et plus évocateur. Il s’agit en effet de ressentir les difficultés, les peines et les souffrances des autres, et d’agir en conséquence si on le peut pour leur venir en aide.
Une remarque pour conclure : il ne faut pas confondre « compassion » et « apitoiement ». En effet, s’apitoyer sur le sort d’autrui traduit souvent une certaine forme de condescendance à son égard, comme si celui-ci était d’une condition inférieure ou dans une position moins élevée. Lorsque l’on compatit sincèrement à la situation d’une autre personne, on se projette en elle, d’égal à égal. Il n’y a donc aucun jugement de valeur en ce qui la concerne, mais simplement le désir de partager son affliction.
Serge Toussaint
Grand Maître de l’Ordre de la Rose-Croix
http://www.blog-rose-croix.fr/20110902a-propos-de-la-compassion/