Texte de Serge Toussaint
Grand Maître de l’Ordre de la Rose-Croix
Comme vous le savez certainement, la plupart des religions intègrent dans leur enseignement la notion de péché, qu’elles définissent généralement comme un acte contraire à leur credo, et par extension comme opposé à la Volonté divine. En règle générale, on distingue deux sortes de péchés : les péchés véniels, peu graves et aisément pardonnables ; et les péchés mortels, graves au point d’entraîner éventuellement la damnation du pêcheur. Parmi ces derniers, sept sont considérés comme capitaux dans le Christianisme : l’avarice, la colère, l’envie, la gourmandise, la luxure, l’orgueil et la paresse.
Considérant que les péchés sont une offense à Dieu, qu’ils avilissent l’âme de l’être humain et qu’ils compromettent son accès au paradis après la mort, les religions concernées dissuadent leurs fidèles d’en commettre et, lorsqu’ils le font, les engagent à se confesser auprès d’un membre du clergé. À l’issue de cette confession effectuée sous le sceau du secret, le pécheur est généralement absous, non sans avoir fait acte de contrition à travers quelques prières et s’être engagé à ne plus pécher.
Si je respecte ceux et celles qui croient à la notion de péché, je n’y adhère pas, pas plus que la plupart des Rose-Croix. En effet, cette notion est fondée sur l’idée que les religions concernées se font, non seulement de ce qui est bien et mal dans le comportement humain, mais également de ce qui plaît ou déplaît à Dieu à travers ce comportement. Elle est donc subjective et arbitraire. On notera d’ailleurs que ce qui est considéré comme un péché dans tel credo ne l’est pas dans tel autre, ce qui prouve qu’elle ne repose pas sur une ontologie universelle, mais sur une théologie spécifique à chaque religion.
Certes, il y a des comportements fondamentalement bons, et d’autres fondamentalement mauvais. Mais peut-on mettre au même niveau le fait d’être gourmand, qui ne nuit en fait qu’à soi-même, et le fait de tuer, qui constitue une atteinte on ne peut plus grave à l’intégrité d’autrui ? Quant aux péchés dits “mortels”, je vois mal comment et pourquoi ils pourraient faire mourir le corps, d’autant plus qu’ils concernent l’âme et que celle-ci est immortelle par nature. Par ailleurs, je pense qu’aucune personne ayant péché, même très gravement, ne peut être damnée, fut-ce temporairement ou éternellement.
D’un point de vue rosicrucien, les êtres humains que nous sommes ne commettent pas des péchés, mais des erreurs et des fautes plus ou moins graves. Chacune d’elles met en action la loi karmique et donne lieu à des épreuves plus ou moins difficiles, destinées à nous faire comprendre en quoi elles ont été préjudiciables à nous-mêmes ou à autrui. Je suis convaincu également qu’aucune personne extérieure à nous, fût-elle un membre éminent de tel ou tel clergé, ne peut les effacer et nous absoudre. Un tel pouvoir irait à l’encontre de notre évolution spirituelle, laquelle est fondée sur l’obligation pour chacun d’assumer le karma négatif qu’il se crée lui-même par une mauvaise application de son libre arbitre.
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